César de NOSTREDAME (1553-1629)
Pensons un peu…

 

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Nostredame

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ouvrir sur Gallica : Les perles, pp. 35-37.

[…] 

Pensons vn peu comm’ elle estoit rauie
De voir ainsi la fontaine de vie
Si doucement distiller en son cœur
Vne si saincte & suaue liqueur:
Et comme alors elle estoit attentiue
A recueillir cest eau coulante & viue,
Et contempler le visage si beau
De ce beau corps reuenu du tombeau.

Autant de traitz que decoche sa face,
Luy font autant de traitz d’or & de grace,
Chasque rayon, chascun de ses regards
Luy font autant de brandons & de dards.

Là son amant ne tenoit plus voilée
Ny sa beauté, ny sa face estoilée,
Là son poil d’or & de celeste lin
Flottoit party d’vn ruisseau cristalin,
Montant du front, là ses ondes meslées
Couroient à bons sur l’espaule annelées,
Que la nature & le ciel admiroit,
Ou le ciel mesme estonné se miroit.
Là de son œil l’esclatante prunelle
Faisoit briller quelque chose plus belle
Que feu, qu’esclair, qu’estoille, que Soleil
Qui sort des eaux au point de son resueil.
Ce n’est œillet, ny rubis que sa bouche,
Car art aucun de peinture ne touche
A ces beaux Arcs d’où coulerent jadis,
Et vont coulant les eaux de Paradis.

Et bien qu’a peindre vne petite image
Toute la France à ma main doiue hommage:
Et que mes traits hardis subtils & flous
Facent Apelle & Tymanthe jalous,
Mon pinceau d’or qui sur sa main se jouë,
Reste confus, aussi bien que sa jouë,
Et qu’à son teint de pur laict & de sang
Qu’on voit meslé de vermeil & de blanc:
Ny mon blanc d’œuf, ou mon blanc de Venise:
Ma laque d’Inde, ou de Florence exquise:
Mon Azur d’Acre & mon bleu d’outre-mer
Peuuent son jour, ny son ombre animer.

Là mon art cede & là ma main s’arreste,
Là ceste amante attentiue & muette
Tombe en extase & voit des yeux son Dieu
Qui comme esclair disparoit de ce lieu.

[…] 

On peut cliquer sur certains mots pour voir les épithètes de Maurice de La Porte
 
 

[…] 

Penſons vn peu comm’ elle eſtoit rauie
De voir ainſi la fontaine de vie
Si doucement diſtiller en ſon cœur
Vne ſi ſaincte & ſuaue liqueur:
Et comme alors elle eſtoit attentiue
A recueillir ceſt eau coulante & viue,
Et contempler le viſage ſi beau
De ce beau corps reuenu du tombeau.

Autant de traitz que decoche ſa face,
Luy font autant de traitz d’or & de grace,
Chaſque rayon, chaſcun de ſes regards
Luy font autant de brandons & de dards.

Là ſon amant ne tenoit plus voilée
Ny ſa beauté, ny ſa face eſtoilée,
Là ſon poil d’or & de celeſte lin
Flottoit party d’vn ruiſſeau criſtalin,
Montant du front, là ſes ondes meſlées
Couroient à bons ſur l’eſpaule annelées,
Que la nature & le ciel admiroit,
Ou le ciel meſme eſtonné ſe miroit.
Là de ſon œil l’eſclatante prunelle
Faiſoit briller quelque choſe plus belle
Que feu, qu’eſclair, qu’eſtoille, que Soleil
Qui ſort des eaux au point de ſon reſueil.
Ce n’eſt œillet, ny rubis que ſa bouche,
Car art aucun de peinture ne touche
A ces beaux Arcs d’où coulerent jadis,
Et vont coulant les eaux de Paradis.

Et bien qu’a peindre vne petite image
Toute la France à ma main doiue hommage:
Et que mes traits hardis ſubtils & flous
Facent Apelle & Tymanthe jalous,
Mon pinceau d’or qui ſur ſa main ſe jouë,
Reſte confus, außi bien que ſa jouë,
Et qu’à ſon teint de pur laict & de ſang
Qu’on voit meſlé de vermeil & de blanc:
Ny mon blanc d’œuf, ou mon blanc de Veniſe:
Ma laque d’Inde, ou de Florence exquiſe:
Mon Azur d’Acre & mon bleu d’outre-mer
Peuuent ſon jour, ny ſon ombre animer.

Là mon art cede & là ma main s’arreſte,
Là ceſte amante attentiue & muette
Tombe en extaſe & voit des yeux ſon Dieu
Qui comme eſclair diſparoit de ce lieu.

[…] 

 
 

En ligne le 16/06/16.
Dernière révision le 25/02/24.