Vasquin PHILIEUL (1522-?)
Devers l’Aurore…
Avignon, B. Bonhomme, 1555 (Paris, 1548).

Deuers l’Aurore, ou si doulcement l’souffle de ventaure
Au nouueau temps faict esmouuoir les fleurs,
Et oiselletz accommencent leurs uers,
Ie sens trestous les soucis de mon ame
Se rendre à celle, ou gist toute leur force:
Dont il conuient retourner à mes nottes.

Feisse ie tant par mes souefues nottes,
Que les souspirs peussent adoulcir l’aure,
Tant que raison luy feist ce qui m’est force,
Mais en hiuer plus tost naistront les fleurs,
Qu’amour fleurisse en celle gentile ame,
Qui ne s’en chault de rithmes ne de uers,

Mon Dieu que i’ay des larmes & des uers
Desia espars? & en combien de nottes
Ay ie essayé d’humilier celle ame,
Qui plus dure est qu’un grand rocher à l’aure?
L’aure qui bien esmeut rameaux & fleurs,
Mais esmouuoir ne peult plus grande force.

Amour souloit un temps uaincre par force
Hommes & dieux, comme on lit par maintz uers,
Et ie l’apprins sur les premieres fleurs.
Mais maintenant ny amour, ne ses nottes,
Ne pleurs, ne cris peuuent faire que l’aure
Tire ou de uie, ou de peine mon ame.

Donc au besoing o ma miserable ame,
Assemble tous tes engins & ta force,
Tandis que i’ay de uie encores l’aure,
On peult tout faire, ainsi qu’on dict, par uers,
Soit enchanter les Aspics auec nottes,
Soit exorner d’hyuer le glas de fleurs.

Par tous les champs rient herbes & fleurs:
Dont ne crois point que celle angelique ame
N’oye le son des amoureuses nottes.
Mais si fortune inique ha plus grand force,
Irons pleurant & en chantant ce uers:
Qu’auec un bœuf boiteux on chasse l’aure.

Ie prens aux rhetz l’aure, & au glas les fleurs,
En uers ie tente une sourde & dure ame,
Qui rien ne craint force d’amour ne nottes.

On peut cliquer sur certains mots pour voir les épithètes de Maurice de La Porte
 
 

Deuers lAurore, ou ſi doulcement lsouffle de ventaure
Au nouueau temps faict eſmouuoir les fleurs,
Et oiſelletz accommencent leurs uers,
Ie ſens treſtous les ſoucis de mon ame
Se rendre à celle, ou gist toute leur force:
Dont il conuient retourner à mes nottes.

Feiſſe ie tant par mes ſouefues nottes,
Que les ſouſpirs peuſſent adoulcir laure,
Tant que raiſon luy feiſt ce qui meſt force,
Mais en hiuer plus toſt nairont les fleurs,
Quamour fleuriſſe en celle gentile ame,
Qui ne sen chault de rithmes ne de uers,

Mon Dieu que iay des larmes & des uers
Deſia eſpars? & en combien de nottes
Ay ie eſſayé dhumilier celle ame,
Qui plus dure eſt quun grand rocher à laure?
Laure qui bien eſmeut rameaux & fleurs,
Mais eſmouuoir ne peult plus grande force.

Amour ſouloit un temps uaincre par force
Hommes & dieux, comme on lit par maintz uers,
Et ie lapprins ſur les premieres fleurs.
Mais maintenant ny amour, ne ſes nottes,
Ne pleurs, ne cris peuuent faire que laure
Tire ou de uie, ou de peine mon ame.

Donc au beſoing o ma miſerable ame,
Aſſemble tous tes engins & ta force,
Tandis que iay de uie encores laure,
On peult tout faire, ainſi quon dict, par uers,
Soit enchanter les Aſpics auec nottes,
Soit exorner dhyuer le glas de fleurs.

Par tous les champs rient herbes & fleurs:
Dont ne crois point que celle angelique ame
Noye le ſon des amoureuſes nottes.
Mais ſi fortune inique ha plus grand force,
Irons pleurant & en chantant ce uers:
Quauec un bœuf boiteux on chaſſe laure.

Ie prens aux rhetz laure, & au glas les fleurs,
En uers ie tente une ſourde & dure ame,
Qui rien ne craint force damour ne nottes.

 

En ligne le 14/04/24.
Dernière révision le 17/04/24.