PLutôt
le bal de tant d’astres
divers
Sera lassé, plutôt la terre et
l’onde,
Et du grand
Tout l’âme
en tout vagabonde
Animera les abîmes
ouverts.
Plutôt les cieux de mer seront
couverts,
Plutôt sans forme ira confus le monde :
Que je sois serf
d’une maîtresse
blonde,
Ou que j’adore une femme
aux yeux
verts.
Car cet œil
brun
qui vint premier éteindre
Le jour
des miens, les sut si bien atteindre,
Qu’autre œil
jamais n’en sera le vainqueur.
Et quand la mort
m’aura la vie
ôtée,
Encor là-bas, je veux aimer l’Idée
De ces beaux yeux
que j’ai fichés au cœur.
Plutôt le bal.) Il dit que toutes choses impossibles adviendront plus tôt qu’il soit amoureux de femme, qui ait le visage blond, ou l’œil vert. Car l’œil & le teint brun de sa dame l’ont tellement assujetti, que même après sa mort, il en aimera l’Idée, qui est empreinte en son cœur. Il a dit cela même en l’Ode à Jacques Peletier, des beautés qu’il voudrait en s’amie, là où il écrit ainsi,
L’âge non
mûr, mais verdelet encore,
C’est l’âge seul qui me dévore
Le cœur d’impatience atteint.
Noir je veux l’œil, et brun le teint,
Bien que l’œil vert toute la France adore.
Et est à noter, que les anciens estimaient l’œil noir être un des points le plus requis à la perfection de beauté. D’où est que Vénus est nommée par Pindare elikôpis, c’est-à-dire aux yeux noirs, en l’Ode sixième des Pythies & par Hésiode en la Théogonie, elikoblepharos. Ainsi même est appelée Chryséis au premier de l’Iliade,
Prin g’apo patri philô domenai elikôpida kourèn.
Et Homère a baillé même épithète aux Muses, Amphi dios kourous elikôpides espete mousai. Et l’auteur au second des Odes, Muses aux yeux noirs mes pucelles.
Les Latins ne l’ont pas ignoré, entre lesquels Horace écrit aux Odes,
Et Lycum nigris oculis, nigroque
Crine decorum.
Et en l’Art Poétique,
Spectandum nigris oculis, nigroque capillo.
L’œil vert est par les poètes attribué à Minerve, par eux souvent nommée glaukôpis. Et le grand œil à Junon, laquelle ils nomment boôpis. Le bal de tant d’astres divers.) Le mouvement. Ainsi disent souvent les poètes Grecs choros astrôn. Plutôt la terre & l’onde.) seront aussi lassées. Et du grand Tout.) Selon les Platoniques, qui constituent une âme de l’Univers épandue par toute les parties du monde : de laquelle Virgile parle ainsi au sixième de l’Énéide,
Principio cœlum, ac terram,
camposque liquentes
Lucentemque globum Lunæ, Titaniaque astra
Spiritus intus alit, totamque infusa per artus
Mens agitat molem, & magno se corpore miscet.
Les
abîmes ouverts.) Il entend ce vide
qu’Empédocle, Lucrèce, & autres
disent être outre le ciel. L’idée.)
Idées sont images des choses, qui s’impriment en
notre âme. Mot Grec.
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[texte modernisé]
[R]
En ligne le 02/07/07.
Dernière révision le 16/06/11.