Flaminio de BIRAGUE
(?-?)
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Je m’égare souvent en un antre désert


 


L’abbé GOUJET, 1748
 

FLAMINIO DE BIRAGUE.

Le nom de Flaminio de Birague est plus connu que celui de Bre­tin[1], mais il n’est pas plus dis­tin­gué sur le Par­nasse. La nais­sance n’aug­mente pas les ta­lents. Birague sor­ti d’une fa­mille illustre de Mi­lan, qui avait tou­jours sui­vi le par­ti de la France, était peut-être le pre­mier de son nom qui se fût amu­sé à faire la cour aux Muses Fran­çaises, mais il n’en reçut que des fa­veurs très mé­diocres. Il était neveu du cé­lèbre René de Bi­rague, qui fut suc­ces­si­ve­ment Am­bas­sa­deur au Con­cile de Trente, Garde des Sceaux sous Charles IX et Chan­ce­lier de France, et qui étant de­ve­nu veuf de Va­lence Bal­biane, fut pro­mu au Car­di­na­lat en 1578. Fla­mi­nio eut pour père Charles de Bi­rague, frère de ce Car­di­nal, Conseil­ler d’État, et Che­va­lier des Ordres du Roi en 1580. Je ne sais de quelle fa­mille était sa mère : dans les poé­sies qu’il lui adresse, il ne la nomme jamais que Madame de Bi­rague. Pour lui, il ne prend point d’autre qua­li­té que celle de Gen­til­homme ordi­naire de la Chambre du Roi.

Il aima pas­sion­né­ment une Demoi­selle qu’il nomme Marie, et à qui il a consa­cré la plus grande par­tie de ses poé­sies. Le reste ne contient que quelques Son­nets, des Qua­trains et Hui­tains, et une Élé­gie assez longue où il dé­plore le temps que ses amours lui ont fait perdre, et le peu de satis­fac­tion qu’il y a trou­vé : c’était ce qu’il aurait dû pré­voir avant de s’y enga­ger ; mais la pré­voyance et la pas­sion sont enne­mies, et se trouvent rare­ment en­semble. La plu­part de ses Son­nets sont adres­sés aux Princes et aux Dames les plus dis­tin­guées de son temps par leur nais­sance. La sienne pou­vait le mettre en liai­son avec les uns et les autres. Il ne dit rien dans toutes ces pièces, qui mérite d’être obser­vé. Plu­sieurs sont adres­sées au Car­di­nal de Bi­rague, son oncle, et c’est à lui que tout le recueil est dé­dié : c’était man­quer, ce semble, à la dé­cence, de faire pré­sent à un Car­di­nal de tant de poé­sies amou­reuses. Ron­sard, Blaise de Vige­nère, et Blan­quet, Poète Fran­çais, Secré­taire du Roi, ont aus­si les hom­mages du Poète. Fla­mi­nio avait lu avec trop de res­pect et de doci­li­té les ouvrages du pre­mier ; il l’avait choi­si pour modèle, et il n’en a pris que le ga­li­ma­tias et l’obs­cu­ri­té. Les éloges qu’il accorde à quelques Au­teurs de son siècle ne sont pas non plus preuve de son goût ; je vous en rap­por­te­rais pour exemple son Son­net à Blaise de Vige­nère, sur sa tra­duc­tion de Tite-Live, si ses vers n’étaient pas trop mau­vais pour être ci­tés.

Par­mi quelques Épi­taphes qui font par­tie du même recueil, telles que celle de Va­lence Bal­biane, femme du chan­ce­lier de Bi­rague, de Louis de Birague, Lieu­te­nant pour le Roi en Pié­mont, et un petit nombre d’autres, on lit celle de Jean de Laval, Mar­quis de Nesles, qui avait épou­sé Fran­çoise de Bi­rague, fille unique de René de Bi­rague, le même que je viens de vous nom­mer. Cette Épi­taphe n’est qu’un jeu de mots, peu conve­nable à ce genre de pièce :

Passant penses-tu pas de passer le passage
Qu’en mourant j’ai passé ? pense le même pas :
Si tu n’y penses bien, de vrai tu n’es pas sage,
Car possible, demain passeras au trépas.

Le recueil des poé­sies de Fla­mi­nio de Bi­rague porte le titre de pre­mières Œuvres ; mais je n’en ai point vu d’autres, et Du Verdier ne cite que celles dont je viens de par­ler. On lit au com­men­ce­ment quelques pièces en vers Latins adres­sées à l’Au­teur par Édouard Du Monin[2], et d’autres en Fran­çais par dif­fé­rents Écri­vains. Ce sont des éloges, et rien de plus.

L’abbé GOUJET,
Bibliothèque française,
ou Histoire de la Litté­rature française,
tome XII, 1748, pp. 370-373
[Gallica, NUMM-50655, PDF_373_376].


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Notes

[1] La « vie » de Birague succède dans la Biblio­thèque de l’abbé Goujet à celle de Phi­li­bert Bretin.


[2] L’édi­tion des Premières Œuvres poé­tiques de Birague décrite par l’abbé Goujet est l’édi­tion de 1581, comme il appert dans le cata­logue, p. 475 du tome XII [PDF_478]. L’édi­tion en ligne sur Gallica est celle de 1585 et ne com­porte pas de vers limi­naires latins de Du Monin.




En ligne le 30/11/08.

Dernière révision le 10/10/24.