ton cœur, aime-ris nymphe,
Gèle mes pleurs de sa brumale glace.
PHILIBERT BUGNYON.
Vous venez de voir un Gentilhomme qui n’a composé que des poésies spirituelles et morales [1], voici un grave Jurisconsulte, qui en la même qualité de Poète, n’a presque fait résonner que des sons amoureux. Ce Jurisconsulte est Philibert Bugnyon, né à Mâcon : il prenait les titres de Docteur ès Droits, d’Avocat en la Sénéchaussée, Siège présidial de Lyon, et Parlement de Dombes. Il fut depuis Conseiller du Roi, et son Avocat en l’élection de Lyon et pays Mâconnais. Il mourut vers 1590. Salmon Macrin avait chanté sa Gélonis ; Pontus de Tyard, sa Pasithée ; Ronsard, sa Cassandre ; Joachim Du Bellay, son Olive ; Muret, sa Marguerite ; Des Autels, sa Sainte ; Baïf, sa Méline ; Maurice Scève, sa Délie ; Bugnyon, à leur exemple, dont il s’autorise, et voulant, comme eux, monter sa lyre sur le ton amoureux, chanta sa Gélasine,
Qui vaut autant en Français
que Riante,
Allègre, amène, éveillée,
plaisante,
Pour qui les Dieux laisseraient leur Olympe, etc.
Cette Gélasine était une Demoiselle de Mâcon, sœur des Demoiselles de Chanein et de Feurs. Bugnyon qui à cause d’elle, avait pris pour devise ces mots, Vouloir et espérer, ne soupira que pour elle, ne désira qu’elle, et malgré les obstacles qui s’opposèrent à son amour, ne perdit jamais l’espérance d’obtenir ce qu’il souhaitait avec ardeur. Il ne dit pas si ses vœux furent exaucés, si sa persévérance fut récompensée. Tout ce que l’on voit dans ses Érotasmes de Phidie et Gélasine, c’est qu’il a exprimé en cent manières différentes sa passion pour celle qu’il recherchait, et qu’obligé de quitter Mâcon pour aller à Lyon, il fit à l’objet de ses amours les plus tendres adieux, et qu’il conserva toujours l’espoir de parvenir à la fin qu’il se proposait. Il y a lieu de croire que ce fut de Lyon qu’il envoya à sa Gélasine le recueil de ses souhaits et de ses soupirs, puisque ce fut dans cette Ville qu’il le fit imprimer en 1557.
[…]
L’abbé GOUJET,
Bibliothèque française,
ou Histoire de la Littérature
française,
tome XII, 1748, pp. 113-114
[Gallica, NUMM-50655_PDF_116_117]
(texte modernisé).
Notes
[1] La « vie » de Philibert Bugnyon succède dans la Bibliothèque de l’abbé Goujet à celle de Martin Spifame.
Liens
* On peut trouver en ligne sur Persee, portail de publication électronique de revues scientifiques en sciences humaines et sociales, plusieurs articles consacrés à Philibert Bugnyon publiés dans différentes revues universitaires.
En ligne le 25/06/11.
Dernière révision le 08/08/22.