Étienne JODELLE (1532-1573)
Comme un qui s’est perdu…
Paris, N. Chesneau & M. Patisson, 1574.
ouvrir sur Gallica : Les Amours, Sonnets, XXX, f° 8v°.

Comme vn qui s’est perdu dans la forest profonde
Loing de chemin, d’oree, & d’addresse, & de gens:
Comme vn qui en la mer grosse d’horribles vens,
Se voit presque engloutir des grans vagues de l’onde.

Comme vn qui erre aux champs, lors que la nuict au monde
Rauit toute clarté, i’auois perdu long temps
Voye, route, & lumiere, & presque auec le sens,
Perdu long temps l’obiect, où plus mon heur se fonde.

Mais quand on voit (ayans ces maux fini leur tour)
Aux bois, en mer, aux champs, le bout, le port, le iour,
Ce bien present plus grand que son mal on vient croire.

Moy donc qui ay tout tel en vostre absence esté,
I’oublie en reuoyant vostre heureuse clarté,
Forest, tourmente, & nuict, longue, orageuse, & noire.

On peut cliquer sur certains mots pour voir les épithètes de Maurice de La Porte
 
 

Comme vn qui seſt perdu dans la foreſt profonde
Loing de chemin, doree, & daddreſſe, & de gens:
Comme vn qui en la mer groſſe dhorribles vens,
Se voit preſque engloutir des grans vagues de londe.

Comme vn qui erre aux chãps, lors que la nuict au mõde
Rauit toute clarté, iauois perdu long temps
Voye, route, & lumiere, & preſque auec le ſens,
Perdu long temps lobiect, où plus mon heur ſe fonde.

Mais quand on voit (ayans ces maux fini leur tour)
Aux bois, en mer, aux champs, le bout, le port, le iour,
Ce bien preſent plus grand que ſon mal on viẽt croire.

Moy donc qui ay tout tel en voſtre abſence eſté,
Ioublie en reuoyant voſtre heureuſe clarté,
Foreſt, tourmente, & nuict, longue, orageuſe, & noire.

 

En ligne le 10/05/06.
Dernière révision le 27/09/25.