L’Île fleurie, ou les premières Amours d’Erice
Mélanges poétiques
devenir un Protée
Et changer comme lui
de forme
en mon amour.
ROBERT ANGOT.
Ce dernier Panégyriste de Courval-Sonnet [1], Robert Angot, Sieur de l’Esperonnière, était de Caen. Cela est dit expressément dans les quatre vers qu’on lit au bas de son portrait gravé à l’âge de vingt-deux ans :
Caen fut le lieu de ma chère
naissance,
Phœbus poussa mes esprits ici-bas :
Puisse à jamais vivre après mon trépas
Mon âme au Ciel, et mon nom dans la France.
Je ne juge pas de la destinée de son âme ; à l’égard de sa réputation, elle est depuis longtemps ensevelie dans l’oubli.
« Robert Angot, dit M. Huet, a fait plus d’honneur à Caen sa patrie par ses vers, que Caen ne lui en a fait par son souvenir ; car son nom y est presque inconnu. »
Outre les pièces que je viens de citer, faites à la louange de Courval-Sonnet, dont une traduite des vers grecs de Tostain, semble prouver qu’Angot entendait cette langue, j’ai vu de lui le Prélude poétique, dédié à M. le Prince de Condé, imprimé à Paris en 1603, et loué à son tour par Thomas Roggers, Écuyer, Gentilhomme Anglais ; Jean Du Teil, de Tours ; Jean Le Blanc, Parisien ; et quelques anonymes.
Le Prélude poétique est un recueil de Poésies diverses, où l’Auteur ne chante guère que ses Amours. Tel est en particulier l’unique objet de L’Île fleurie, ou les premières Amours d’Érice, en quatre-vingt-huit Sonnets, suivis de douze Élégies. M. Huet dit que dans ces Sonnets, Angot semble s’être proposé pour modèle ceux de Pétrarque pour Laure ; cela peut être ; mais il faut avouer que la copie est fort inférieure à l’original.
Des douze Élégies, la première est d’une longueur excessive. C’est le récit d’un Songe poétique. Angot y suppose, qu’un vieil Hermite lui apparaît, et qu’après lui avoir donné beaucoup d’avis (qu’il rapporte) il lui fait voir tout ce qui s’est passé dans l’âge d’or, et depuis. Quoiqu’il y ait de bons préceptes dans cette Élégie, et même assez de naturel, sa prolixité ennuie beaucoup. On lit dans la même Pièce la Fable du Rat de Ville et du Rat des Champs, telle qu’elle a été depuis contée par La Fontaine. Je n’y ai trouvé de la différence que pour la diction : ce sont les mêmes pensées ; c’est la même morale. La seconde Élégie n’est que la fable d’Orphée voulant rappeler Eurydice des Enfers.
[…]
L’abbé GOUJET,
Bibliothèque française,
ou Histoire de la
Littérature
française,
tome XIV, 1752, pp. 313-315
[Gallica, NUMM-50657, PDF_316_318]
(texte modernisé).
Notes
[1] La « vie » de Robert Angot succède dans la Bibliothèque de l’abbé Goujet à celle de Courval-Sonnet qui s’achève par ces phrases : « Les deux volumes de Sonnet, dont je viens de rendre compte, sont chargés de plusieurs éloges donnés à l’auteur. […] Dans le volume de 1623 on ne lit qu’une Ode française, mais fort longue, de Pierre de Deimier, Provençal, et deux petites Pièces d’Angot, l’une de seize vers, l’autre de trente-six. »
Liens
Étude de l’œuvre
* On peut lire sur l’œuvre d’Angot un article de Henry Lafay, Robert Angot de l’Éperonnière, paru dans Les Annales de Normandie en 1977, en ligne sur Persée, portail de publication électronique de revues scientifiques en sciences humaines et sociales.
Liens valides au 12/06/21.
mes yeux chargés de nues
alambiquent mon âme en larmes continues
En ligne le 17/04/06.
Dernière révision le 21/02/24.