GRatie chapochi il ciel largo destina

rara uertu non gia dumana gente
sotto biondi capei canuta mente
en humil donna alta belta diuina
leggiadria singulare & pellegrina
et cantar che ne lanima si sente
landar celeste eluago spirto ardente
chogni dur rompe & ogni alteza inchina

E t que begliocchi che i cor fanno smalti
possenti areschiarar abysso & nocti
& torre lalme a corpi & darle altrui
col dir pien dintellecti dolci & alti
coi sospiri soauemente rotti
da questi magi transformato fui

Avignon, B. Bonhomme, 1555, I, CXXVIII, p. 126 [←Gallica].

Graces quà peu le ciel large destine,
Rare uertu, & facon non humaine,
Soubz cheueulx dor teste chenue & saine,
En humble dame une beaulté diuine,

Deliberée & facon peregrine,
Chant singulier plus doulx que de Sireine,
Marcher celeste, & lame dardeur pleine,
Qui fend les rocz, & les haultz monts encline:

Les yeulx pouuans enclumes amollir,
Et les abys de lumieres remplir
Et transmuer dun corps en aultre lame:

Propos remplis de spirituelle flamme,
Et les souspirs rompus souefuement,
Telz enchanteurs font de moy changement.

Paris, veuve Maurice de La Porte, 1552, p. 14 [←Gallica].

Vn chaste feu qui les cuœurs illumine,
Vn or frisé de meint crespe annelet,
Vn front de rose, vn teint damoiselet,
Vn ris qui lame aux astres achemine.

Vne vertu de telles beaultez digne,
Vn col de neige, vne gorge de laict,
Vn cuœur ia meur dans vn sein verdelet,
En dame humaine vne beaulté diuine.

Vn œil puissant de faire iours les nuictz,
Vne main forte à piller les ennuiz,
Qui tient ma vie en ses doitz enfermée:

Auecque vn chant offensé doulcement
Ore dvn ris, or dvn gemissement:
De telz sorciers ma raison fut charmée.

Paris, veuve M. de La Porte, 1552, livre I, p. 27 [←Gallica].

Haute beauté dans vne humble pucelle,
Vn beau parler plein de graue douceur,
Sous blondz cheueux vn auantchenu cueur,
Vn chaste sein ou la vertu se cele:

En corps mortel vne grace immortelle,
En douceur fiere vne douce rigueur,
En sage esprit vne gaye vigueur,
En ame simple vne sage cautele:

Et ces beaux yeux mouueurs de mes ennuis,
Yeux suffisantz pour eclersir les nuitz,
Qui font sentir aux plus transis leur flame,

Sont les larrons (& point ie ne men deux)
Qui, me guettans au passage amoureux,
Au depourueu me rauirent mon ame.

Anvers, Chr. Plantin, 1583, La Marguerite, I, p. 805 [←Gallica].

Beavte celeste en vne Fille humaine,
Vn vif esprit de sagesse pourueu,
Vn brillant œil, où mon Tyran iay ueu,
Vn ris mignard qui lame aus Astres meine.

Vne vertu diuinement hautaine,
Vn dous refus à qui ioffre maint uœu,
Vne fierté quon sert à son auœu,
Et qui mes yeus fait sourçer en fontaine.

Vn sein esmeu dvn animé soupir,
Vn chant qui peut toute peine assoupir,
Vne main propre à rauir les pensées.

Vn vain espoir, vn emmiellé parler,
Vn graue port, vn pas ferme au baler :
Ont par destin mes amours commençées.

Gramont, Des dons que le ciel… (1842)   ↓   ↑   ⇑  →t.m.
Poésies de Pétrarque, « Du vivant de Laure »,
Paris, Paul Masgana, 1842, sonnet CLXXVIII, p. 147 [←Gallica].

les charmes de sa dame sont supé­rieurs à tout

Des dons que le ciel ne pro­digue qu’à peu de monde, une rare ver­tu qui n’est plus dans la na­ture hu­maine, un esprit du vieil âge sous une blonde che­ve­lure, et dans une mo­deste dame une haute et di­vine beau­té ;

Une grâce sin­gu­lière et toute nou­velle, et le chant qu’on sent jus­que dans l’âme ; la cé­leste dé­marche, et le souffle char­mant et ar­dent qui amol­lit toute du­re­té et abaisse tout or­gueil.

Et ces beaux yeux qui changent les cœurs en ro­cher, et qui peuvent éclai­rer l’abîme et les té­nèbres, et enle­ver l’âme aux corps pour la don­ner à d’autres.

Tels sont, avec les paroles rem­plies de sens doux et éle­vés, avec les sou­pirs déli­cieu­se­ment inter­rom­pus, les magi­ciens qui m’ont mé­ta­mor­pho­sé.

























Avignon, B. Bonhomme, 1555, I, CXXVIII, p. 126 [←Gallica].

Graces quà peu le ciel large destine,
Rare uertu, & facon non humaine,
Soubz cheueulx dor teste chenue & saine,
En humble dame une beaulté diuine,

Deliberée & facon peregrine,
Chant singulier plus doulx que de Sireine,
Marcher celeste, & lame dardeur pleine,
Qui fend les rocz, & les haultz monts encline:

Les yeulx pouuans enclumes amollir,
Et les abys de lumieres remplir
Et transmuer dun corps en aultre lame:

Propos remplis de spirituelle flamme,
Et les souspirs rompus souefuement,
Telz enchanteurs font de moy changement.

Paris, veuve Maurice de La Porte, 1552, p. 14 [←Gallica].

Vn chaste feu qui les cuœurs illumine,
Vn or frisé de meint crespe annelet,
Vn front de rose, vn teint damoiselet,
Vn ris qui lame aux astres achemine.

Vne vertu de telles beaultez digne,
Vn col de neige, vne gorge de laict,
Vn cuœur ia meur dans vn sein verdelet,
En dame humaine vne beaulté diuine.

Vn œil puissant de faire iours les nuictz,
Vne main forte à piller les ennuiz,
Qui tient ma vie en ses doitz enfermée:

Auecque vn chant offensé doulcement
Ore dvn ris, or dvn gemissement:
De telz sorciers ma raison fut charmée.

Paris, veuve M. de La Porte, 1552, livre I, p. 27 [←Gallica].

Haute beauté dans vne humble pucelle,
Vn beau parler plein de graue douceur,
Sous blondz cheueux vn auantchenu cueur,
Vn chaste sein ou la vertu se cele:

En corps mortel vne grace immortelle,
En douceur fiere vne douce rigueur,
En sage esprit vne gaye vigueur,
En ame simple vne sage cautele:

Et ces beaux yeux mouueurs de mes ennuis,
Yeux suffisantz pour eclersir les nuitz,
Qui font sentir aux plus transis leur flame,

Sont les larrons (& point ie ne men deux)
Qui, me guettans au passage amoureux,
Au depourueu me rauirent mon ame.

Anvers, Chr. Plantin, 1583, La Marguerite, I, p. 805 [←Gallica].

Beavte celeste en vne Fille humaine,
Vn vif esprit de sagesse pourueu,
Vn brillant œil, où mon Tyran iay ueu,
Vn ris mignard qui lame aus Astres meine.

Vne vertu diuinement hautaine,
Vn dous refus à qui ioffre maint uœu,
Vne fierté quon sert à son auœu,
Et qui mes yeus fait sourçer en fontaine.

Vn sein esmeu dvn animé soupir,
Vn chant qui peut toute peine assoupir,
Vne main propre à rauir les pensées.

Vn vain espoir, vn emmiellé parler,
Vn graue port, vn pas ferme au baler :
Ont par destin mes amours commençées.

Gramont, Des dons que le ciel… (1842)   ↓   ↑   ⇑ o
Poésies de Pétrarque, « Du vivant de Laure »,
Paris, Paul Masgana, 1842, sonnet CLXXVIII, p. 147 [←Gallica].

les charmes de sa dame sont supé­rieurs à tout

Des dons que le ciel ne pro­digue qu’à peu de monde, une rare ver­tu qui n’est plus dans la na­ture hu­maine, un esprit du vieil âge sous une blonde che­ve­lure, et dans une mo­deste dame une haute et di­vine beau­té ;

Une grâce sin­gu­lière et toute nou­velle, et le chant qu’on sent jus­que dans l’âme ; la cé­leste dé­marche, et le souffle char­mant et ar­dent qui amol­lit toute du­re­té et abaisse tout or­gueil.

Et ces beaux yeux qui changent les cœurs en ro­cher, et qui peuvent éclai­rer l’abîme et les té­nèbres, et enle­ver l’âme aux corps pour la don­ner à d’autres.

Tels sont, avec les paroles rem­plies de sens doux et éle­vés, avec les sou­pirs déli­cieu­se­ment inter­rom­pus, les magi­ciens qui m’ont mé­ta­mor­pho­sé.

























textes originaux
[R]

 

En ligne le 23/10/20.
Dernière révision le 12/12/24.