Pierre de RONSARD (1524-1585)
Paris, veuve Maurice de La Porte, 1553.

TOujours des bois la cime n’est chargée,
Sous les toisons d’un hiver éternel,
Toujours des Dieux le foudre criminel
Ne darde en bas sa menace enragée.

Toujours les vents, toujours la mer Égée
Ne gronde pas d’un orage cruel :
Mais de la dent d’un soin continuel,
Toujours toujours ma vie est outragée.

Plus je me force à le vouloir tuer,
Plus il renaît pour mieux s’évertuer
De féconder une guerre en moi-même.

Ô fort Thébain, si ta serve vertu
Avait encor ce monstre combattu,
Ce serait bien de tes faits le treizième.

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de Muret

Toujours des bois.) Il dit, que toutes choses ont quelque inter­mission, fors son tourment, qui ne le laisse jamais en repos. Sous les toisons d’un hiver.) Sous les neiges. La mer Égée.) Qui est toutefois la plus tempétueuse mer, qu’on sache : comme témoigne Denys en sa cosmo­graphie.

Ou gar tis keinô enaligkia kumat’ ophellei
Ypsothi mormurôn heteros poros amphitritês

De féconder une guerre en moi-même.) De faire qu’une guerre naisse perpé­tuellement dedans moi. Ô fort Thébain.) Il s’adresse à Hercule, qui purgea la terre de monstres : et dit, que s’il pouvait combattre la force du soin qui lui ronge l’esprit, on pourrait bien compter cela pour le treizième de ses beaux faits. Ta serve vertu.) Parce que tout ce que fit Hercule, fut en obéissant à Eurysthée. Le treizième.) Parce qu’on nombre douze principaux labeurs d’Hercule, combien qu’il y en a beaucoup d’autres.
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[texte modernisé]
[R]

 
 

En ligne le 06/07/08.
Dernière révision le 23/12/12.