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Pour un beau
trait de vengeance
lâcher,
Et en un jour mille offenses punir,
Tout coi amour de l'arc se sut munir,
Comme attendant temps, et lieu pour fâcher :
Allée était ma vertu se cacher
Au cœur, pour là et aux yeux subvenir,
Quand ce grand coup là-bas sentis venir,
Où tous les dards se soulaient reboucher.
Dont de prim saut elle fut tant troublée,
Qu'elle n'eut onc la vigueur ni espace,
Qu'au besoin put d'armes faire assemblée.
Ou me tirer de ce mal et fallace
Par bon avis à raisonnable vie,
Où voudrait ore, et sa force est ravie.
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POur faire sa
vindicte et plus accortement
En un seul jour punir un million d'offenses
Amour avec son arc se remit en instances,
Et choisit temps et lieu à son commandement.
Ma vertu
cependant au cœur étroitement
Ne pouvait désarmée abonder aux défenses :
Car là le corps mortel me fit lors ses outrances.
Où soulait
toute flèche avoir rebouchement.
Volontiers je me fusse précipité de haut :
Mais quand force domine obtempérer il faut,
Et contre cet enfant il n'est nul invincible.
En effet
tout ravi en ce premier assaut,
Force, vigueur, et temps me firent tel défaut,
Que voulant résister, il me fut impossible.
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Pour offenses
punir plus de mille en un jour
Et montrer un beau tour de sa vengeance fière,
Cupidon sans désir prit en sa main meurtrière
Son arc, comme un qui guette à nuire autrui, son tour.
Ma vertu
lors au cœur faisait un doux séjour
Pour illec, et aux yeux me servir de barrière.
Quand un coup tout mortel vint de force guerrière
Au lieu qui depointait jà
tous les traits d'Amour.
Mais du premier assaut non attendu troublée
Elle était tant du temps que de force frustrée
Pour vêtir au besoin en sursaut le harnois.
Ou d'un âpre et haut lieu me faire une retraite,
Pour fuir accortement
le coup de ma défaite,
Ce qui ne m'est permis or' quand je le voudrais.
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»» texte original
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COMMENTAIRE DE
MALDEGHEM : Ici com- mence le Poète à conter le
commencement de ses fortunes amoureuses, aux premiers six vers
démontrant qu'Amour, comme son ennemi le vint couvertement
assaillir, pour le punir des offenses qu'il lui avait faites en lui
résistant tant par le passé, & aux autres que toute
sa vertu s'était retirée au cœur pour se défendre
des tentations qui éloignent l'esprit de Dieu. Et ainsi pendant
qu'il avait les pensées au ciel il ne prit pas garde des
accidents extérieurs par lesquels il fut pris en
rencontrant le regard de Mme Laure. & aux autres six vers il se
plaint
qu'il n'avait ni la puissance ni le temps pour s'opposer à
telles
tentations, ou se retirer à la roche de la raison, par laquelle
il s'eût pu défendre de ne venir en proie à
l'appétit
sensuel.
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