Marc Papillon de LASPHRISE (1555-1599)
Paris, Jean Gesselin, 1597.

COmposition belle, hé ! que tu es loüable,

Chacun, mesme la nuict, desire ton accord,
Bien que ton pertuis soit aucunesfois bien ord,
Ta vertu neantmoins est plaisamment aimable.

Non, non ; que dy-ie ? elle est entre toute admirable,
Tu peux maugré l’orgueil de la fille de mort
Faire paroistre vn droict, faire paroistre vn tort,
Mais le droict non rompu est le plus desirable.

O plaisante fureur, courriere du repos,
Commode au genre humain mesme dessus les flots,
Mais qui obiecte vn peu fuyr ta compagnie,

C’est la laide vapeur du feu non bluettant:
Car ordinairement quand ta flame est finie,
Rien ne sert de boucher ton chaud trou dégoutant.

 EXPLI­CA­TION. 

C’est vne chan­delle de suif dans vn chan­de­lier; elle est fort aggre­able la nuict : encores que le chan­de­lier ne soit pas quel­ques­fois net, elle ne laisse d’estre plai­sante, à cause de sa clair­té ; aus­si la peut-on dire ad­mi­rable, veu que mau­gré l’obs­cure nuict elle fait en li­sant les liures con­noistre la rai­son & l’in­ius­tice. Tou­tes­fois quand la chan­delle n’est rom­pue, elle est plus belle ; quand on l’al­lume, c’est alors que la nuict s’ap­proche, si­gni­fiant qu’il se faut peu apres cou­cher & re­po­ser. Elle est du tout ne­ces­saire, & mesme sur la mer : car là on ne s’en peut pas­ser. Mais ce qui est de­sag­gre­able en elle, c’est quand elle est toute brus­lée, la grande pu­an­teur qui en vient : car on a beau estoup­per le chan­de­lier tout chaud & tout dé­gou­tant du suif, on ne laisse de sen­tir vne mau­uaise odeur.
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[texte original] → texte modernisé
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En ligne le 20/06/20.
Dernière révision le 19/04/22.