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TRADUCTIONS
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IMITATIONS
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1548,
Philieul, traduction.
1575, Du Tronchet,
traduction.
1600, Maldeghem, traduction.
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1550,
Du Bellay, imitation.
1555, Baïf, imitation.
1573, Desportes, imitation.
1583, Blanchon, imitation.
1583, Cornu, imitation.
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Seul et pensif ces champs et vert coteau
Vais mesurant pas à pas lentement,
Et des humains je fuis l’assemblement :
Mais tel fuir pourtant rien ne me vaut.
Au fort ainsi gouverner il me
faut,
Pour ne montrer aux gens mon gref tourment.
Vu qu’à me voir on lit dehors comment
Toujours j’endure au dedans un feu chaud.
Je crois qu’ici meshui il n’y
a plaine,
Ni mont, ni bois, qui ne sachent l’usage
Que tient ma vie à autrui incertaine.
Mais je ne sais chercher lieu
tant sauvage,
Qu’amour toujours ne m’y suive en volant,
Et l’un à l’autre ensemble allons
parlant.
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texte original |
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ARGUMENT selon Philieul : Se promenant
Pétrarque de la Roche de dons à
l’île de Phalet, & par ces
champêtres, qui lors étaient plus vêtus
d’arbres, fit ce sonnet. |
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Seul, et
pensif par la déserte plaine
Rêvant au bien, qui me fait douloureux,
Les longs baisers des colombs amoureux
Par leur plaisir firent croître ma
peine.
Heureux oiseaux, que votre vie est pleine
De grand’ douceur ! ô baisers
savoureux !
Ô moi deux fois, et trois fois
malheureux,
Qui n’ai plaisir que
d’espérance vaine !
Voyant encor sur les bords de mon fleuve
Du cep lascif les longs embrassements,
De mes vieux maux je fis nouvelle
épreuve.
Suis-je donc veuf de mes sacrés rameaux ?
Ô vigne heureuse ! heureux enlacements !
Ô bord heureux ! ô
bienheureux ormeaux !
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Solitaire
et pensif par les lieux plus sauvages,
Où des hommes le train moins se montre
à mes yeux,
Seul je vas dégorgant mon travail
ennuyeux,
Or dans les bois ombreux, or du long des rivages.
Là, seul je ramentois celle, qui en sa garde
A mon cœur mon fuitif, et rendre ne le
veut,
Et, quand elle voudrait, qui rendre ne le peut,
Tant humaine la sent mon traître
qu’elle garde.
Là, tout parle d’amour, et n’y a, ni
ruisseau,
Ni bête, ni rocher, ni pré,
ni arbrisseau,
Qui ne sente avec moi d’amour quelque
étincelle.
Et je ne puis aller en déserts si lointains,
(Soit par les lieux plus bas, soit par les plus
hautains)
Qu’à cet aveugle dieu tant
soit peu je m’y cèle.
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Solitaire
et pensif dans un bois écarté,
Bien loin du populaire et de la tourbe
épaisse,
Je veux bâtir un temple à ma
seule Déesse,
Pour appendre mes vœux à sa
divinité.
Là de jour et de nuit par moi sera chanté
Le pouvoir de ses yeux, sa gloire, et sa
hautesse :
Et, dévot, son beau nom
j’invoquerai sans cesse,
Quand je serai pressé de quelque
adversité.
Mon œil sera la lampe, et la flamme immortelle,
Qui me va consumant, servira de chandelle :
Mon corps sera l’autel, et mes soupirs
les vœux.
Par mille et mille vers je chanterai l’office :
Puis épanchant mes pleurs, et coupant
mes cheveux,
J’y ferai tous les jours de mon
cœur sacrifice.
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Tout seul,
et en rêvant au champ plus solitaire
Je mesure mes pas posés appesantifs,
Et fais que mes deux yeux de fuir attentifs
Font que vestige humain ne leur y soit contraire.
Trouver ne m’est possible autre
meilleur repaire,
Pour fuir le soupçon du peuple conceptif,
Car en mes actions par plaisir sensitif
Ce que j’ai dans le cœur ma face ne peut taire.
Tellement que je crois qu’il
n’est ni mont, ni plaine,
Ni fleuve ni forêt à qui ne soit certaine,
La trempe de ma vie recelée à autrui.
Mais chercher je ne puis ma vie si lointaine
Qu’amour ne m’y attrape et partout il me
traîne,
Parlant toujours à moi, et moi toujours à lui.
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Loin
des beaux yeux de ma douce contraire,
Je ne fais rien qu’à part me
lamenter,
Bâtir au Ciel, et la terre
harpenter,
Depuis la Vienne, au rivage
d’Ibère,
Errer aux champs, tout triste, et solitaire,
Morne, et pensif, sans aucun
fréquenter,
Et n’est en moi de pouvoir
aliéner,
La vive ardeur de ma flamme ordinaire.
Vagant ainsi que celui qui de nuit,
Se voit tout seul par les ombres conduit,
Au plus profond d’un Antre solitaire.
Au fond d’un Val, ou au milieu d’un Bois,
À qui ne sert la parole et la voix,
Que la clarté, qui seule lui peut
plaire.
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Solitaire, et
pensif, et veuf de toute joie,
Ainsi que je pensais au sort de mes amours,
Je disais à part moi, las ! faudra-t-il toujours,
Que pour suivre le mal du bien je me fourvoie ?
Faudra-t-il que toujours languissant on me voie
Jeter mille soupirs sans aide ni secours,
Et sans pouvoir trouver un assuré recours
M’étant fait sectateur d’une amoureuse
voie ?
Quand voici le meurtrier qui saccage mes os
Décevant mes esprits d’un
façonné propos,
Qui lune contre moi son arc tire sagette.
Voilà dit-il, le bien, dont je
guerdonne ceux,
Qui pour vaincre l’effort de mes bras rigoureux
Détestent les horreurs de ma dure tempête.
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Je vais seul et pensif les champs plus égarés
Et déserts mesurant d’une marche tardive,
Et je porte la vue à fuir ententive
La terre, où que les pieds humains sont figurés.
Je ne sais autre tour, afin que
séparés
Les hommes soient de moi, et toute autre âme vive,
Car en mes faits, desquels rien qu’un pleurer
dérive,
Les chauds traits que je sens au cœur, sont
déclarés.
Tant que d’or’s en avant je
crois que les rivières,
Les montagnes et bois connaissent les manières
De ma vie, et son but inconnu à autrui.
Toutefois je ne sais chercher tant âpre
voie
Ni sauvage, qu’Amour toujours ne me convoie,
Avec moi raisonnant, et moi avecque lui.
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texte original |
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COMMENTAIRE DE
MALDEGHEM : Le Poète dit par ce Sonnet, qui est assez
facile,
comment il
est devenu amateur de sa solitude, & ennemi de la conversation
des
hommes. Et que pourtant il cherche les déserts, lesquels
avec
les monts
& fleuves connaissent la façon de sa vie, &
dit enfin,
que
pourtant Amour ne l’abandonne jamais. |
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