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Tandis mes yeux
lassés qu'êtes à contempler
Le visage de celle, où prîtes votre mort,
Soyez (je vous supplie) avisés et d'accord,
Qu'amour jà vous défie à soupirs redoubler.
Il est vrai que mort seule à mes pensers combler
Peut l'amoureux chemin, qui les conduit au port
De leur douce santé, et nous y peut troubler.
Mais cacher se peut bien à vous votre lumière
Par moindre objet, d'autant, que moins êtes rusés,
Et que votre vertu est beaucoup moins entière,
Que celle de l'esprit. Pourtant donc avisez
Pour la fin, ains que soit l'absence coutumière,
Qui tôt, comme je crains, nous rendra soucieux,
Prenez au long travail ce bref confort, mes yeux.
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ARGUMENT selon
Philieul : Pétrarque faisait compagnie à cheval à
Madame Laure qui allait en Provence : mais ce n'était que pour
jusqu'à Durance, dont pensant qu'il se faudrait séparer
au port, & lui retourner arrière, il enhortait ici ses yeux
de fort regarder leur Dame cependant qu'ils étaient ensemble,
prognostiquant bien qu'il la perdrait.
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MEs yeux las et
fâchés pendant que je vous mire
Dans les excellents yeux qui vous font presque morts,
Maintenant je vous prie d'être fins et accorts :
Car amour vous en veut et déjà j'en soupire.
Mort seule à mon penser peut user son empire
Et clore le chemin qui les conduit aux ports,
Heureux de leur salut, mais à vous les supports
De votre bien on peut céler pour objet pire.
Car vous êtes formés moins entiers et
parfaits
Et de moindre vertu nature vous a faits :
Pource (dolents) avant que l'heure nous attire
Prenez à toute fin tout ainsi que je fais
Des maux desquels déjà je sens venir le faix,
Quelque doux réconfort pour un si long martyre.
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Mes yeux
lassés tant qu'en la belle vue
Je vous retiens, de celle qui vous tue,
Soyez, je prie, accorts, car le défi
Jà vous a fait Amour, dont j'ai ennui,
La mort serrer peut seule à mes pensées
L'amoureux pas, par où elle, [gradées ?]
Sont au doux port, auquel leur salut est :
Votre clarté se peut par moindre objet
Céler à vous, comme faits de matière
Moindre, et ayant la vertu moins entière :
Mais tristes, las, devant que des pleurs soient
Les heures-ci, dont le temps jà nous point,
Ne faites faute, or au partir de prendre
Un bref confort à un si long attendre.
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»» texte original
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COMMENTAIRE DE
MALDEGHEM : Comme le Poète se devait éloigner de Madame
Laure il allait prendre congé d'elle, par où il prie par
cette chanson, à ses yeux, qu'ils prennent devant partir quelque
confort des beaux yeux d'elle, pour se pouvoir d'icelui
défendre, durant si longue absence, contre le regret qu'ils
auront d'être privés de sa vue. |
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