Jean de SPONDE (1557-1595)
André MAGE DE FIEFMELIN (c. 1561-c. 1620)
s. l., 1588.

Tout s’enfle contre moi, tout m’assaut, tout me tente,
Et le Monde, et la Chair, et l’Ange révolté,
Dont l’onde, dont l’effort, dont le charme inventé,
Et m’abîme, Seigneur, et m’ébranle, et m’enchante,

Quelle nef, quel appui, quelle oreille dormante,
Sans péril, sans tomber, et sans être enchanté,

Me don’ras-tu ? Ton Temple où vit ta Sainteté,
Ton invincible main, et ta voix si constante.

Et quoi ? mon Dieu, je sens combattre maintes fois
Encore avec ton Temple, et ta main, et ta voix,
Cet Ange révolté
, cette chair, et ce Monde.

Mais ton Temple pourtant, ta main, ta voix sera
La nef, l’appui, l’oreille,
où ce charme perdra,
Où mourra cet effort, où se rompra cette Onde.

Les Œuvres, Le Spirituel
Poitiers, Jean de Marnef, 1601.

LA chair, le monde, Adam vont mourant à jamais
En mes sens, âme et cœur ; et vivent en leur place
DIEU, l’Esprit, et la Foi (dont sentent l’efficace
Satan, la mort, l’offense) et me font vivre en paix.

Le Diable, ainsi, la Parque et le péché, défaits
Par l’homme-Dieu vainqueur et par vie et par grâce,

Ne règnent plus en moi, quoi qu’en moi par eux fasse
Le Monde, Adam, la chair, haineux des saints effets.

Ou si je sens encor l’onde, l’effort, la tache
Du monde, de la chair, et d’Adam sans relâche
Qui tâche à mabîmer, ébranler et souiller,

Satan, la mort, le mal, les animant ce semble,
DIEU, l’Esprit, et la Foi me font vivre et veiller
Pour rompre, vaincre, perdre onde, effort, tache ensemble.

 

En ligne le 05/11/23.
Dernière révision le 05/11/23.