Marie de ROMIEU
(?-?)
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1581 : Des humains la beauté…

 

 
L’abbé GOUJET, 1752
 

MARIE ET JACQUES DE ROMIEU.

Les Dames Des Roches mé­ri­tèrent aussi les éloges de Marie de Romieu, De­mo­iselle d’une fa­mille noble du Vi­va­rais[1]. Dans son Brief dis­cours, en vers, où elle tâche de mon­trer, que l’ex­cel­lence de la femme sur­passe celle de l’homme, elle apporte en exemple les deux Muses de Poi­tiers, pour faire voir que les femmes sont aus­si ca­pables que les hommes de réus­sir et de se faire hon­neur dans l’étude des lettres. Les dames Des Roches sont en ce dis­cours en fort bonne com­pa­gnie ; Marie de Romieu les y joi­gnant avec toutes celles de son sexe dont parle l’His­toire Sa­crée et Pro­fane, qui se sont il­lus­trées par leurs ta­lents. Et ce n’est pas par ce seul en­droit qu’elle s’ef­force de prou­ver sa thèse. Elle trouve dans les femmes plus de dou­ceur, de mo­des­tie, de can­deur, de bonne foi que dans les hommes. Elle les venge de ce qu’on a cou­tume de dire contre leur pente à la pas­sion de l’amour, et en re­jette tout le mal, tout l’odieux sur l’homme. Elle ôte même à celui-ci la va­ni­té qu’il tire de sa force, de son cou­rage, de sa va­leur, en lui oppo­sant plu­sieurs hé­roïnes dont les faits d’armes ont en­core sur­pas­sé ceux des hé­ros les plus re­nom­més.

Marie de Ro­mieu en­tre­prit ce Dis­cours pour ré­pondre à une sa­tire contre les femmes que Jacques de Romieu, son frère, qui était alors à Pa­ris, avait écrite et en­voyée à leur oncle Per­ri­net Des Aubers, homme d’esprit et qui cul­ti­vait aus­si la lit­té­ra­ture dans le Vi­va­rais. Elle adres­sa ce petit poème à son frère lui-même, par une courte Épître en prose, où l’on voit que la di­ver­si­té des sen­ti­ments n’al­té­rait point leur union. Jacques de Romieu applau­dit au zèle de sa sœur, et fit im­pri­mer son poème en 1581 à Paris, le dé­diant à Mar­gue­rite de Lor­raine Du­chesse de Joyeuse, parce que la fa­mille de Romieu était de­puis long­temps atta­chée à la mai­son de Joyeuse.

Jacques joi­gnit au dis­cours de sa sœur, toutes les poé­sies que celle-ci avait dé­jà faites, et dont il avait des co­pies. C’est peu de chose. Ce sont deux Odes, en­vi­ron 25 Son­nets, une Églogue amou­reuse, une Élé­gie en fa­veur du Sei­gneur Gra­tian Mais­son­nier, son cou­sin, pas­sion­né de l’amour chaste et hon­nête de Lu­crèce ; l’Épi­taphe ou Élé­gie fu­nèbre con­te­nant l’éloge his­to­rique et cir­cons­tan­cié de Jean Chas­te­lier, Sei­gneur de Mi­lieu, Con­seil­ler du Roi en son Con­seil d’État, et In­ten­dant de ses fi­nances ; l’Éloge du Rien, imi­té du La­tin de Jean Pas­se­rat, et en­voyé pour Étrennes à Ma­dame la Maré­chale de Retz, dont l’esprit était très cul­ti­vé ; une Énigme, des Stances et autres petites pièces, presque toutes adres­sées à quelques De­moi­selles de la fa­mille de Chas­te­lier ; et une Com­plainte de la mort de N. S. J. C. Made­moi­selle de Romieu a fait en­core d’autres poé­sies que son frère pro­met­tait pa­reil­le­ment de mettre au jour, mais qui n’ont point pa­ru. La Croix-du-Maine, qui cite de la même, une Ins­truc­tion en prose, pour les jeunes Dames, impri­mée à lyon en 1573, dit qu’elle vivait encore en 1584.

[…] 

L’abbé GOUJET,
Biblio­thèque fran­çaise,
ou Histoire de la Litté­ra­ture française,
tome XIII, 1752, pp. 272-275
[Gallica, NUMM-50656, PDF_298_301]
(texte modernisé).


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Notes

[1] Les « vies » de Marie et Jacques de Romieu prennent place dans la Biblio­thèque de l’abbé Goujet à une ving­taine de pages de dis­tance de celles des Dames Des Roches de Poi­tiers.





Liens

Étude en ligne

* On peut lire en ligne une présen­ta­tion de la vie et de l’œuvre de Marie de Romieu, par Claude La Charité, sur une page de la Société Inter­na­tio­nale pour l’Étude des Femmes de l’Ancien Régime (SIEFAR).

Liens valides au 08/03/24.

Textes en ligne

* On peut lire de Marie de Romieu le Bref discours, que l’excel­lence de la femme surpasse celle de l’homme, transcrit par Claude La Charité, sur une page de L’Offi­cine de Mercure, site de l’ate­lier « Langue et litté­ra­ture du XVIe siècle » de l’Univer­si­té Paris IV.

Liens valides au 08/03/24.

* L’Univer­si­té du Min­ne­so­ta avait réa­lisé une sélec­tion des Œuvres poé­tiques de Marie de Romieu, archi­vée aujour­d’hui sur web.archive.org. Cette page était inscrite dans un projet de publi­ca­tions en ligne de textes, biogra­phies et biblio­gra­phies de femmes écri­vains fran­çaises de l’Ancien Régime (early modern french women writers).

Liens valides au 08/03/24.

 

Le ciel voûté n’a point tant de luisants brandons,
Comme l’on comptera de féminins mentons
Qui ont abandonné leurs caduques richesses
Et se sont faits au ciel immortelles Déesses.

 



En ligne le 23/04/05.
Dernière révision le 08/03/24.