Premier jour de la Semaine
Second jour de la Semaine
Sixième jour de la Semaine
…la Toux, le Bâillement,
La Syncope, la Soif,
l’Horreur, le Tremblement,
Le Battement du pouls,
l’Ardeur, la Rêverie,
Et la douleur de tête…
GUILLAUME DE SALUSTE
seigneur du bartas
Pierre de Ronsard jouissait paisiblement et sans trouble de la haute et unique principauté de notre Parnasse français, lorsque Du Bartas vint à paraître au monde. Mais le mérite des ouvrages de cet excellent homme (1), la noble matière qu’il traitait et la sublimité (2) de ses raisonnements et de ses pensées, commencèrent si bien à partager les esprits des doctes, que tandis que les uns demeuraient toujours fermes dans leur premier respect envers Ronsard les autres se révoltèrent contre lui, et proclamèrent hautement Du Bartas le prince des poètes français ; et pour fortifier d’autant plus ce nouveau parti ceux de la religion prétendue réformée, du nombre desquels il était, prirent comme à tâche de lire, de traduire et de commenter ses ouvrages, et de les faire réimprimer à l’envi par toutes les villes de France et d’Allemagne où ils étaient les maîtres. De là vient que nous n’avons peut-être point de livre en notre langue plus connus, ni plus fameux que les siens ; s’ils sont préférables à ceux de Ronsard, du moins quant au caractère de la vraie poésie, car quant à la dignité de leur sujet je n’en parle point, je m’en rapporte à ceux qui ont une exacte connaissance des secrets de cet art, et qui savent distinguer le style du vrai poète d’avec celui du poète historien. Je dirai seulement qu’il semble que Du Bartas n’eût pas si bien connu la force et la beauté de notre langue, si Ronsard auparavant ne l’eût cultivée, qu’il fut peut-être plus heureux que lui au choix de ses matières, et qu’il fit en docte historien ce que sans doute Ronsard eût mieux fait en noble poète. Les sujets sérieux que Ronsard a traités avec tout l’air de l’ancienne et brillante poésie, me semblent des preuves assez claires de cette vérité, et quiconque voudra considérer de près son fragment du poème de la loi qu’il fit après avoir vu la première Semaine de Du Bartas, jugera bien par cet essai, que son vaste esprit ne trouvait rien d’impossible ni même rien de difficile dans les belles lettres. Du Bartas lui-même en demeura bien d’accord, et le témoigna bien hautement, en quelque sorte, lorsque ravi des œuvres de Ronsard, il ne put s’empêcher dans le second jour de sa Seconde Semaine d’en parler de la sorte :
L’autre est ce grand Ronsard
qui pour orner la France
Le grec et le latin dépouille
d’éloquence
Et d’un esprit hardi manie heureusement
Toute sorte de vers, de style et d’argument.
[…]
Guillaume COLLETET,
Vies des Poètes gascons,
publiées avec introduction, notes et
appendices
par Philippe Tamisey de Larroque,
Paris, Auguste Aubry, 1866, pp. 71-72
[gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k97359927] [PDF_73_74]
(texte modernisé).
Notes de l’éditeur
(1) Le mot homme n’est pas dans l’original. Il était resté au bout de la plume de G. Colletet.
(2) G. Colletet avait d’abord écrit solidité.
Qui veut compter les feux tant nôtres
qu’antarctiques
Se doit rendre inventeur d’autres
arithmétiques.
Liens
Études en ligne
* Parmi de très nombreuses publications en ligne, on peut lire en guise d’introduction à la vie et à l’œuvre de Du Bartas, « Du Bartas à Nérac », article d’Yvonne Bellanger publié dans la revue Albineana-Cahiers d’Aubigné (année 2012, n° 24), consultable sur Persée, portail de publication électronique de revues scientifiques en sciences humaines et sociales.
* On peut lire aussi, pour commencer à entrevoir ce qui fait la singularité de la Semaine, « Du Bartas et L’ars memorativa », article de Gilles Banderier publié en 2008 dans le n° 87 de la revue Tangence, en ligne sur érudit.org, portail québécois de publications en sciences humaines et sociales.
Liens valides au 12/12/21.
En ligne le 18/06/18.
Dernière révision le 11/06/22.